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lions. Qui nous rendra les pères et les docteurs dont le regard embrassait toutes les sciences ? La vérité est comme le soleil ; elle veut l’œil de l’aigle pour la contempler.

— Ah ! monsieur Safrac, vous portiez, vous, sur toutes les questions cet œil audacieux que rien n’éblouit. Je me rappelle que vos opinions effrayaient parfois ceux mêmes de vos confrères que la sainteté de votre vie remplissait d’admiration. Vous ne redoutiez pas les nouveautés. C’est ainsi, par exemple, que vous incliniez à admettre la pluralité des mondes habités.

Son œil s’alluma.

— Que diront les timides quand ils liront mon livre ? Ary, sous ce beau ciel, dans ce pays que Dieu fit avec un spécial amour, j’ai médité, j’ai travaillé. Vous savez que je possède assez bien l’hébreu, l’arabe, le persan et plusieurs idiomes de l’Inde. Vous savez aussi que j’ai transporté ici une bibliothèque riche en manuscrits anciens. Je suis entré profondément dans la connaissance des langues et des traditions de l’Orient primitif. Ce grand labeur, avec l’aide de Dieu, n’aura pas été sans fruit. Je viens de terminer mon livre des Origines qui répare et soutient cette exégèse sacrée dont la