Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/37

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tomba. Dans le monde religieux, on annonçait la prochaine entrée de Henri V à Paris. On montrait la voiture et les chevaux du roi. Les clercs étudiaient le cérémonial du sacre et les dames, dans les châteaux, brodaient, sur des écharpes blanches, des fleurs de lis d’or. La Monarchie de droit divin était faite. Il fallut que le comte de Chambord la défit lui-même, et rendît sa restauration impossible en rejetant le drapeau tricolore, objet du culte national. Le clergé alors se tourna vers les Orléans qui, malgré la pesanteur allemande de leur chef, étaient des prétendants redoutables, avec leur grosse clientèle bourgeoise et leurs milliards. Le soldat ignorant par qui l’Assemblée avait remplacé Thiers, tenta le coup du 16 mai, coup brutal et timide où se sentait la main du prêtre. Les hommes qu’il appela au ministère étaient des monarchistes, mais ils étaient aussi des parlementaires qui ne voulaient pas faire appel à la force, ce qui paraissait incroyable à tout le monde, et même à leurs préfets. Les républicains d’alors, médiocres au gouvernement, étaient excellents dans l’opposition. Ils combattirent les monarchistes avec une exacte discipline et une brillante ardeur. L’opinion était pour eux dans les villes ; les campagnes commençaient à leur revenir. Les élections les ramenèrent au pouvoir.

Thiers était mort. Gambetta qui, par son éloquence ardente, avait assuré la victoire électorale, devenait le chef de l’opinion et l’arbitre de la République. De lui surtout dépendait la politique du nouvel État à