Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/131

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éclataient les malédictions, les sarcasmes, le rire guttural du vieux romantique.

Qu’elle était grêle alors la crécelle de mon parrain qui répondait par le Roi d’Yvetot et le Meunier Sans-Souci, en agitant ses breloques sur son ventre rebondi !

Je serais bien incapable de rapporter leurs conversations avec fidélité. Et c’est sans doute l’essentiel qui m’a échappé. Si je fais effort pour retrouver quelques-uns de leurs propos, il me semble que M. Danquin pouvait n’avoir pas toujours tort, comme je croyais. Il se plaignait que bien des nuances du langage, autrefois discernées et reconnues, fussent maintenant confondues et qu’on écrivît moins bien et moins clairement qu’autrefois. Il regrettait aussi que la raison eût perdu son empire sur les esprits. Mais M. Marc Ribert avait pour lui l’inestimable avantage d’exprimer des pensées difficiles à comprendre. Leur obscurité me les rendait belles. On n’admire guère ce qui est clair. L’admiration ne va point sans surprise. Aussi j’étais transporté d’enthousiasme en entendant définir l’œuvre romantique.

— C’est, disait Marc Ribert, l’œuvre de révolte et de douleur ; c’est le deuil amer mêlé