Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/31

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pas tomber dans l’escalier qui était un peu noir.

Je sortis de ce misérable logis le cœur sec et sans aucune pitié de la veuve Bargouiller. Mais le visage de Fontanet exprimait, au contraire, si profondément un zèle pieux, les joies austères de la bienfaisance, l’ardeur d’une âme charitable, que, me comparant à lui, je fus honteux de moi-même.

— On ne donne pas assez ! soupira mon ami. De quel plaisir on se prive !

Et son museau pointu reluisait d’une sainte allégresse.

Cette pensée, cette attitude, cet air pénétré firent impression sur moi, et je m’efforçai d’éprouver d’aussi beaux sentiments que Fontanet.

— Qu’est-ce que tu sens donc, Pierre ? me demanda ma mère.

Sa finesse d’odorat lui faisait découvrir d’ordinaire en quelles compagnies les êtres qu’elle aimait étaient allés en son absence. Mais sa confiance en Fontanet lui ôtait toute inquiétude. Elle n’insista pas.

Sans tendresse pour la veuve Bargouiller, je résolus cependant de lui continuer mes bienfaits. Ce n’était pas facile. Je n’avais pu