Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/87

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tant ses gants. Elle se tâta le poignet pour voir si elle n’avait pas de fièvre. Brusquement, un choc clair d’argenterie sur la table de desserte la réveilla. Elle entendit son mari qui disait :

— Ma chère amie, Gavaut a prononcé aujourd’hui à la Chambre un excellent discours sur la question de la caisse des retraites. C’est extraordinaire à quel point ses idées sont devenues saines et comme maintenant il frappe juste. Oh ! il a beaucoup gagné.

Elle ne put s’empêcher de sourire.

— Mais, mon ami, Gavaut, c’est un pauvre diable qui n’a jamais pensé qu’à se tirer de la cohue des affamés et qu’à se pousser. Des idées, Gavaut, il n’en a qu’aux coudes. Est-ce que vraiment on le prend au sérieux dans le monde politique ? Croyez bien qu’il n’a jamais fait illusion à une femme, pas même à la sienne. Et cependant, pour donner ces illusions-là, il ne faut pas grand’chose, je vous assure.

Et brusquement elle ajouta :

— Vous savez que miss Bell m’a invitée à passer un mois chez elle, à Fiesole. J’ai accepté, je pars.

Moins surpris que mécontent, il lui demanda avec qui elle partait.

Tout de suite elle trouva et dit :

— Avec madame Marmet.