Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/113

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Enfin, les idées religieuses et morales s’étant toutes abîmées les unes sur les autres dans son esprit, M. Bergeret n’éprouvait plus qu’une impression de malaise et il sentait le dégoût recouvrir comme une vaste nappe d’eau sale les flammes de sa colère. Trois secondes pleines s’étaient écoulées et il n’avait point agi, et il était plongé dans un abîme d’irrésolution. Par un instinct obscur et confus, mais qui tenait à son caractère, il avait, dès l’abord, détourné ses regards du canapé, et il les fixait sur le guéridon placé près de la porte, et qui était recouvert d’un tapis de coton olive sur lequel des chevaliers du moyen âge étaient imprimés en couleur. Et ce tissu imitait la vieille tapisserie. M. Bergeret, durant ces trois secondes interminables, avait nettement distingué un petit page qui tenait le casque d’un des chevaliers du tapis. Tout à coup, sur le guéridon, parmi les livres reliés en toile rouge et dorés que madame Bergeret y déposait comme de