Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/184

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— C’est-à-dire que ça tient par la fraude et l’iniquité, répliqua Georges Frémont. Nous sommes tombés dans une citerne de honte. Nos ministres des finances sont aux ordres des banquiers cosmopolites. Et ce qu’il y a de plus triste, c’est que la France, la France antique libératrice des peuples, n’a souci désormais que de venger, en Europe, les droits des porteurs de titres. Nous avons laissé massacrer, sans même oser frémir, trois cent mille chrétiens d’Orient dont nous étions constitués, par nos traditions, les protecteurs augustes et vénérés. Nous avons trahi nos intérêts avec ceux de l’humanité. Tu vois, dans les eaux de Crète, la République nager parmi les Puissances comme une pintade dans une compagnie de goélands. C’était donc là que devait nous conduire la nation amie !

Le préfet protesta :

— Frémont, ne dis pas de mal de l’alliance russe. C’est la meilleure de toutes les réclames électorales.