Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/185

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— L’alliance russe, reprit Frémont en agitant sa fourchette, j’en ai salué la naissance avec une joyeuse espérance. Hélas ! devait-elle nous jeter, à son premier essai, dans le parti du sultan assassin, et nous conduire en Crète pour lancer des obus à la mélinite sur des chrétiens coupables d’une longue misère ? Mais ce n’est pas à la Russie, c’est à la haute banque, engagée sur les fonds ottomans, que nous avions souci de complaire. Et vous avez vu la glorieuse victoire de la Canée saluée par la finance juive avec un généreux enthousiasme.

— La voilà, s’écria le préfet, la voilà bien la politique de sentiment ! Tu devrais pourtant savoir où elle mène. Et je ne vois fichtre pas ce qui peut t’exciter en faveur des Grecs. Ils ne sont pas intéressants.

— Tu as raison, Worms, reprit l’inspecteur des Beaux-Arts. Tu as parfaitement raison. Les Grecs ne sont pas intéressants. Ils sont pauvres. Ils n’ont que leur mer bleue,