Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/330

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elle compta longuement la somme, et recommença trois fois ses calculs en remuant les lèvres comme dans ses prières. Elle vérifia les pièces avec l’inquiétude de ne pas se reconnaître parmi tant d’effigies diverses ; elle mit ce petit bien, le seul qu’elle eût au monde, dans la poche de sa jupe, sous son mouchoir. Et elle enfonça sa main dans la poche.

Ces soins étant pris, elle dit :

— Monsieur, vous avez toujours été bon pour moi. Je vous souhaite bien du bonheur. Mais, pas moins vrai, vous m’avez chassée.

— Vous me croyez méchant, répondit M. Bergeret. Pourtant, si je me sépare de vous, ma bonne Euphémie, c’est à regret et parce qu’il le fallait. Si je puis vous aider en quelque chose, je le ferai bien volontiers.

Euphémie se passa le revers de la main sur les yeux, renifla et dit avec douceur, en répandant de grosses larmes :

— Personne n’est méchant ici.