Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/168

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ses desseins. Il mit dans ses écrits et dans ses actions le génie de la clarté. Il fut ami de l’ordre et de la paix jusque dans la guerre, sensible à l’harmonie et si habile constructeur de lois, que nous vivons encore, tout barbares que nous sommes, sous la majesté de son empire, qui a fait le monde tel qu’il est aujourd’hui. Vous voyez, mon fils, que je ne lui ménage pas la louange ni l’amour. Capitaine, dictateur, souverain pontife, il a pétri l’univers dans ses belles mains. Pour moi, j’ai été professeur d’éloquence au collège de Beauvais, secrétaire d’une chanteuse de l’Opéra, bibliothécaire de M. l’évêque de Séez, écrivain public au charnier des Saints-Innocents et précepteur du fils de votre père à la rôtisserie de la Reine Pédauque ; j’ai fait un beau catalogue de manuscrits précieux, j’ai écrit quelques libelles, dont il vaut mieux ne pas parler, et tracé sur du papier à chandelle des maximes dédaignées des libraires. Pourtant je ne changerais pas mon existence contre celle de ce