Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/238

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» Voici cet apologue :

» Quand le jeune prince Zémire succéda à son père sur le trône de Perse, il fit appeler tous les académiciens de son royaume, et, les ayant réunis, il leur dit :

» — Le docteur Zeb, mon maître, m’a enseigné que les souverains s’exposeraient à moins d’erreurs s’ils étaient éclairés par l’exemple du passé. C’est pourquoi je veux étudier les annales des peuples. Je vous ordonne de composer une histoire universelle et de ne rien négliger pour la rendre complète.

» Les savants promirent de satisfaire le désir du prince, et s’étant retirés, ils se mirent aussitôt à l’œuvre. Au bout de vingt ans, ils se présentèrent devant le roi, suivis d’une caravane composée de douze chameaux, portant chacun cinq cents volumes. Le secrétaire de l’académie, s’étant prosterné sur les degrés du trône, parla en ces termes :

» — Sire, les académiciens de votre royaume