Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/70

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d’aujourd’hui, et enfin ce Beyle (Stendhal[1]), dont rien ne peut rendre la piquante vivacité. Voilà ce qui faisait le fond de cette conversation délicieuse. M. Mérimée et M. Beyle avaient ensemble des entretiens inimitables par l’originalité tout à fait opposée de leur caractère et de leur intelligence, qui faisait valoir l’un par l’autre et élevait par la contradiction, à leur plus grande puissance, des esprits d’une si haute portée ! Beyle était ému de tout et il éprouvait mille sensations diverses en quelques minutes. Rien ne lui échappait et rien ne le laissait de sang-froid ; mais ses émotions tristes étaient cachées sous des plaisanteries, et jamais il ne semblait aussi gai que les jours où il éprouvait de vives contrariétés. Alors quelle verve de folie et de sagesse ! Le calme insouciant et légèrement moqueur de M. Mérimée le troublait bien un peu et le rappelait quelquefois à lui-même ; mais, quand il s’était contenu, son esprit jaillissait de nouveau plus énergique et plus original. Personne n’avait de plus vives sympathies, mais aussi des inimitiés plus prononcées : dans ces inimi-

  1. L’auteur de Rouge et Noir, de la Chartreuse de Parme, etc.