Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/119

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Tantôt vers l’autre armée, et les faire trembler
En lourds oscillements qu’un cri peut ébranler
Et pousser brusquement au sens de la victoire !
Et quel autre moment, gros d’un siècle d’Histoire,
Quand, tout d’un coup, l’armée — et nul ne sait comment —
Sent qu’elle a la journée, et d’un seul glissement
Refoule l’ennemi brisé dans la défaite !
Puis ce fut leur déroute et leur vaste retraite,
Et la poursuite, et les derniers combats, enfin
La Paix !
La Paix !Et maintenant, combien de temps ce frein
Tiendra-t-il en repos cette race hautaine ?
Ils sont persévérants, faits d’orgueil et de haine ;
J’ai voulu d’un traité qui ne les blessât pas ;
Mais nos fleuves, nos champs, nos vins sont des appâts
Trop offerts à leurs yeux ; leurs nations fécondes,
Multipliant sans cesse et grossissant leurs ondes,
Doivent franchir leur digue et déborder sur nous ;
Et leur sombre génie, ombrageux et jaloux,
De leur gloire éclipsée entretient la rancune.
Ils attendront, muets, jusqu’à l’heure opportune,
Quand l’attaque d’un autre ou nos troubles civils,
Partageant notre force entre plusieurs périls,
À leur guet incessant offriront quelque brèche.