Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/127

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Était plein d’un silence encor plus effrayant.
Et ces torrents couraient vers un gouffre béant.
Seul, debout sur le faîte, échappé par miracle,
Blême, suant d’effroi, je voyais ce spectacle,
J’en embrassais l’horreur dans mes yeux affolés.
Ma gorge se serrait sur mes cris étranglés,
Je pleurais, et parfois, de mes mains étendues,
Je voulais retenir ces foules éperdues
Qui, toujours et toujours, roulaient en bondissant
Vers le torrent de boue et le torrent de sang.


Le Guerrier.

Et que signifiait ce rêve abominable,
Cet épouvantement, dont le récit accable
Et fait tomber ta voix dans de sourdes terreurs ?
Ce n’étaient point, dis-tu, d’inconstantes vapeurs
Qui forment, un instant, une terrible image,
Rencontres que produit et reprend un nuage ;
Son aspect trop solide était trop concerté
Dans l’accord des détails aidant à l’unité,
Pour qu’il n’eût pas en lui le soutien d’une idée,
Sinon, son court passage et sa forme vidée,