Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ou le père, ou le fils, et qui ne laisse pas
Deux générations hors de ses attentats !
Et cest le genre humain, destructeur et victime,
Qui lui-même subit et qui commet le crime,
Qui jette la menace et ressent la terreur,
Qui sur sa propre chair entretient sa fureur,
Et de sa cruauté nourrit son épouvante !
Et cela doit durer ! Et la trace sanglante
S’en va, tant que finisse ou l’homme ou l’univers,
Dans un enfoncement de fumée et d’éclairs !
Sous de pareils destins il vaut mieux ne pas vivre,
Et qu’un geste suprême et viril nous délivre
De jours qu’il faut prévoir cruels ou dégradants !
Qu’il nous ôte d’un air empesté des relents
D’hécatombes sans nombre et d’éternel carnage !
Moi, qui me trouve au bas du versant de mon âge,
Qui n’ai que quelques pas, les derniers pas du soir,
Pour arriver au banc de marbre où vont s’asseoir
Les vieillards fatigués d’avoir franchi la vie.
J’ai hâte d’oublier cette terre asservie,
Sous un maître qui fait un joug du ciel profond,
Sans merci, sans espoir et sans rédemption,
Au tribut éternel du meurtre et de la honte !
Quel cœur de bronze as-tu, guerrier, pour qu’il affronte