Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/132

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Le spectacle effrayant qui sort de ton propos,
Et comment ton sommeil connaît-il le repos ?


Le Guerrier.

Pourquoi donc, après tout, tant accuser la Guerre ?
Ne vois-tu pas qu’un seul, un bien plus grand mystère
Enveloppe celui dont le rêve hagard
A troublé ton esprit et hante ton regard ?
Ô vieillard, c’est la Mort ! Quels qu’ils soient, tous les autres,
Sur lesquels vous butez vos colères d’apôtres,
Ne sont qu’aspects divers et parts de celui-là.
Depuis le premier jour ou son flot s’écoula
Hors du chaos, la Vie est la chute d’un fleuve
Qui se jette au Néant d’une onde toujours neuve ;
Un glissement sans fin de rapides instants
Dont le bond fugitif pend à travers le Temps,
Forme l’éternité de ce torrent qui tombe ;
Et l’immense Univers continûment succombe
À l’immense trépas que lui-même entretient.
C’est là le vrai mystère, ô vieillard ; il contient,
Les autres, et celui dont ton âme exagère