Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/30

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Aux vagues, et juraient de ne point revenir
Qu’elle ne remontât dans la houle et l’écume.


Me retournant alors vers le large aux grands flots,
Je garderai mes yeux sur le nouvel espace,
Sans chercher le moment où, derrière mon dos,
La terre où je naquis à l’horizon s’efface.


Je voguerai, sans pleurs, vers ces temples sereins
D’où le sage contemple et dédaigne le monde,
Vers un rivage aux caps tranquillement hautains,
Au pied desquels se meurt la menace de l’onde !
Ma fin restera seule au pouvoir des Destins !


l’Ami

Si tu laisses ici, frère, ce qui fut toi,
Que crois-tu donc pouvoir emporter de toi-même ?
Sans l’amour des Aïeux, sans la constance au Droit,
Sans rien de ce qui fit de ta vie un poème


D’énergique labeur et de combat altier,
Sur ce bord sans passé qui, dis-tu, te réclame,
De la nef fugitive où tu montas entier,
Il ne débarquera qu’un voyageur sans âme.