Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/98

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Le navire, et s’en va pour dénouer le câble,
L’équipage alourdi que la paresse accable,
Et qui ne rêve rien que de dormir à bord
Du vaisseau pourrissant dans les vases du port,
Se réveille, soudain furieux. Il se rue
Sur ces fous, ces déments, en qui est reparue
L’audace des anciens marins qui s’en allaient
Vers les brumes sans fin, où les glaces gelaient
La voile et le drapeau roidis dans les cordages ;
Où les neiges de bas et ténébreux nuages
Faisaient de leurs bateaux d’informes spectres blancs ;
Ou c’était vers des mers sans souffle, aux cieux brûlants,
Et, de longs mois, pendaient le drapeau et la voile,
Au-dessus d’hommes morts les lèvres sur la toile
Pour la pluie attendue éparse sur le pont ;
Sans dire les écueils, la foudre et le typhon.
« Osent-ils demander un retour aux tempêtes !
» Qu’il demeure interdit à leurs mains inquiètes
» De remettre la barre au gouvernail rouillé,
» Et de toucher au câble à la borne enroulé !
» Que l’ancre, au fond du port, jusqu’à l’anneau s’ensable !
» Que, dans leur attentat aveugle et punissable,
» Contre la sûreté du navire insurgés,
» Les bras soient arrêtés et de liens chargés.