Page:Anissia - Ma vie, récit dicté par une paysanne à T. A. Kouzminskaia.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MA VIE

volaille à la ferme. La vie était libre et bonne. Grande fille, j’étais fort gaie. Qu’il s’agît de chanter ou de danser, j’étais partout la première. Mes compagnes et moi sortions-nous pour nous divertir, c’est moi qui menais le train. On cherchait, pour moi, des épouseurs. Je ne voulais pas d’eux : j’avais quelqu’un dans la tête. Mais celui-là, on n’en voulait pas pour moi.

Ce n’était pas un paysan. Il était attaché au service de mon Maître et habitait les communs. Son nom était Mikhaïlo[1]. Je le voyais souvent quand j’étais de corvée et je m’épris de lui. Lui aussi m’avait dans

  1. Mikhaïlo est un dvorovy, c’est-à-dire un paysan libéré de la corvée, attaché au service du Maître, vivant auprès de lui. Les dvorovye formaient, parmi les gens de la campagne, une catégorie supérieure et privilégiée de fait. Le renvoi au village les rendait corvéables. C’était une punition.
— 30 —