Page:Annales de l universite de lyon nouvelle serie II 30 31 32 1915.djvu/307

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désir de pIaire qu’avait montrés autrefois la rieuse Miss Austen des bals de Steventon ? À quarante ans, malade, vivant loin du monde entre sa mère et sa sœur, Jane Austen s’attriste un peu à l’idée de ne jamais retrouver sa fraîcheur. Elle l’avoue aussi simplement, aussi franchement qu’elle racontait jadis à Cassandre ses succès dans le monde. Aussi bien que l’expression d’une vanité autrefois satisfaite, cet aveu mélancolique est empreint d’une grâce toute féminine. Même à l’heure où toute pensée de coquetterie est loin d’elle, Jane Austen sent dans la perte de sa beauté une irrémédiable déchéance dont elle est trop sage pour se plaindre, mais dont elle est trop vraiment femme pour ne pas souffrir.

Une faiblesse toujours croissante obligea bientôt la malade à cesser tout travail. Loin de pouvoir reprendre ses promenades, ainsi qu’elle l’avait espéré, elle se vit contrainte à garder la chambre. À la fin de mars 1817, au moment où elle interrompit sa dernière ébauche, elle fut pendant quelques jours dans un état si alarmant que les siens, comprenant qu’il était impossible d’avoir à Chawton les soins nécessaires, l’engagèrent à se rendre à Winchester pour y consulter le célèbre docteur Lyford. Une de ses nièces qui la vit pour la dernière fois à Chawton, nous a laissé le récit de cette visite : « En mars de l’année suivante (1817), je compris qu’elle était sérieusement atteinte. Il avait été convenu que vers la fin de ce mois ou au commencement d’avril, j’irais passer quelques jours à Chawton… Mais tante Jane se trouva alors si gravement malade qu’il ne put être question de me recevoir et qu’on m’envoya à Wyards chez ma sœur, Mme Lefroy. Le lendemain, nous allâmes à Chawton pour avoir des nouvelles de notre tante. Elle gardait la chambre, mais fit dire qu’elle désirait nous voir et nous montâmes chez elle. Elle était en robe de chambre et était assise, comme une malade, dans un fauteuil. Elle se leva et nous accueillit avec un sourire. Puis, indiquant des sièges qui avaient été préparés pour nous auprès du feu, elle dit : « Voici une chaise pour la dame