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et un petit tabouret pour vous, Caroline ». Ces paroles insignifiantes sont les dernières paroles de sa bouche que je puisse me rappeler, car je n’ai pas souvenir de ce que fut ensuite la conversation. Je fus frappée du changement qui s’était opéré en elle ; sa voix était faible et lasse. Tout en elle indiquait maintenant l’épuisement et la maladie… Notre visite ne dura pas un quart d’heure. Je ne revis plus tante Jane ». [1]

Cassandre accompagna Jane à Winchester. Les deux sœurs s’installèrent dans une maison de College Street, aujourd’hui désignée à l’attention des promeneurs par une petite plaque de marbre noir rappelant que Jane Austen passa là les derniers jours de sa vie. Une lettre datée du 27 mai dut être écrite à un moment où Jane Austen espérait encore recouvrer la santé. « Je continue à aller mieux, dit-elle à un neveu, mais je ne peux pas me vanter de mon écriture. Ni elle ni mon visage n’ont encore repris leur beauté d’antan. Pourtant, je regagne très rapidement des forces. Je suis hors du lit de neuf heures du matin à dix heures du soir. Je reste étendue sur un canapé, il faut bien en convenir, mais je prends mes repas avec votre tante Cassandre, comme un être doué de raison. Je peux m’occuper et aller d’une pièce à l’autre. Mr. Lyford dit qu’il me guérira et, s’il n’y réussit pas, je rédigerai un mémoire, le présenterai au doyen et au Chapitre et, je n’en doute pas, me verrai rendre justice par cette confrérie pieuse, savante et désintéressée. Notre installation est très confortable. Nous avons un joli petit salon, avec une petite fenêtre en saillie donnant sur un jardin… Si jamais vous êtes malade, puissiez-vous être aussi tendrement soigné que je l’ai été… »

Peut-être conserva-t-elle jusqu’au dernier jour l’illusion d’une guérison possible, et fut-elle soutenue par le double espoir de demeurer auprès des siens et d’exercer encore son talent. Son esprit restait actif et lumineux. Elle composait, sans prendre toujours la peine de les écrire,

  1. Memoir. Pages 161-162.