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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

ment abandonné les grandes villes, où les histoires scatologiques ont conservé le privilège d’exciter une innocente gaîté. Je dis à dessein une innocente gaîté. Il ne faut pas, en effet, mettre sur la même ligne les images sales et les images obscènes. Celles-ci doivent êtres proscrites parce qu’elles sont dangereuses. Les autres sont exemptes d’inconvénient, parce qu’elles ne peuvent pas produire le moindre désordre, provoquer le moindre excès.

En somme, l’histoire d’Ulespiègle ne méritait peut-être pas l’immense succès qu’elle a obtenu, et que j’ai essayé d’expliquer sans chercher à le justifier, mais il serait injuste de la condamner à l’oubli. Elle a d’abord ce grand mérite, fort rare dans les vieux livres de facéties, qu’elle est absolument exempte d’obscénité. Puis on y trouve des contes forts agréables, qui, sauf erreur, lui appartiennent en propre pour la plupart.

Le principal ressort du comique de ce livre, c’est l’affectation que met Ulespiègle à prendre toujours ce qu’on lui dit au pied de la lettre, à faire « selon les paroles, et non selon l’intention. » Cela produit parfois des quiproquo fort réjouissants. On retrouve ce trait de caractère chez un des héros les plus populaires de notre littérature, le célèbre Jocrisse.

Malgré toutes les recherches auxquelles se sont livrés des érudits recommandables, l’existence de Til Ulespiègle n’est pas parfaitement prouvée. Des traditions, des indications contenues dans des ouvrages relativement modernes, des monuments apocryphes, voilà tout ce qu’on a invoqué jusqu’à présent. Les Allemands,