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Les aventures

culière d’hommes dépourvus de ces principes de tendresse & de pitié, qui forment le caractère d’une ame généreuse.

Ces considérations calmèrent ma fureur, & peu-à-eu je renonçai à mes mesures, en concluant qu’elles étoient injustes, & qu’il falloit attendre à les exécuter jusqu’à ce qu’ils eussent commencé les hostilités.

Je repris cette résolution, d’autant plus que le premier parti, loin d’être un moyen de me conserver, tendoit absolument à ma ruine : car c’étoit assez qu’un seul sauvage de toute une troupe échappé à mes mains, pût donner de mes nouvelles à tout un peuple, pour l’attirer dans l’île à venger la mort de leurs compatriotes ; & je pouvois fort bien me passer d’une pareille visite.

Je conclus dont que la raison & la politique devoient me détourner également de me mêler des actions des sauvages, & que mon unique affaire étoit de me tenir à l’écart, & de ne pas faire soupçonner par la moindes marque, qu’il y eût des êtres raisonnables dans l’île.

Cette prudence étoit soutenue par la religion, qui me défendoit de tremper mes mains dans le sang innocent ; innocent, dis-je, par rapport à moi : car pour les crimes que l’habitude avoit rendus communs à tous ces peuples, je devois les

abandonner