Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/28

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roi étoit aussi affligé qu’elle, mais il ne pleuroit point.

Le prêtre s’étant prosterné aux pieds du trône, commença par déplorer le malheur qui venoit d’arriver. L’eau de savon qui lui tomboit dans les yeux, en faisoit sortir des pleurs véritables. Après quelques phrases éloquentes : J’ai fait, dit-il, une remarque qui servira à reconnoître le prince, s’il revient quelque jour. La reine lui promit sa grace, s’il la révéloit. J’ai, dit-il, observé en donnant un jour le fouet au petit prince, parce qu’il avoit pissé au lit, qu’il a une tulipe violette & et noire bien marquée sur la fesse gauche. La nourrice, que l’on envoya chercher aussi-tôt, confirma la chose, & la reine elle-même dit qu’elle se souvenoit bien qu’étant grosse, un des sujets du roi, fort curieux en tulipes, lui en avoit refusé une qu’elle désiroit, & qu’elle s’étoit gratée à cet endroit là.

On écrivit aussi-tôt cette remarque dans les registres publics ; on dessina en marge la tulipe telle que le prêtre la dépeignit, & elle y fut soigneusement conservée. Celui qui rendoit un si grand service à l’état, en fut quitte pour avoir eu la tête lavée ; ce qui a depuis passé en proverbe ; & quand on se contente de réprimander quelqu’un, on dit, par métaphore, qu’on lui a bien lavé la tête.