Page:Arène - La Chèvre d’or.djvu/145

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Me voit-on d’ici, par intérêt — eh ! oui, par intérêt, puisque la fortune est au bout, — feignant une affection que je n’ai pas pour Mlle Norette !

Je me rappelle avec quel sentiment de pitié, mêlé de mépris, il m’est arrivé, jadis, de considérer, dans ce qu’on appelle le monde, des gens honnêtes au demeurant, qui n’auraient pas menti à un homme et qui se mentaient à eux-mêmes impudemment, pour se prouver qu’ils aimaient d’amour quelque insignifiante fillette dont ils ne désiraient guère que la dot.

Et ils finissaient, les malheureux, par se croire épris, comme font ces pleureuses gagées qui, se grisant de leurs propres cris, s’attendrissant par leurs propres plaintes, arrivent à verser de vraies larmes sur la fosse d’un mort qu’elles n’ont pas connu.

Il me répugnerait d’agir ainsi, bien qu’après tout, avec Mlle Norette, maîtresse et gardienne de la Chèvre d’Or, mon cas ait je ne sais quoi d’agréablement chevaleresque.

Mais, hélas ! comme en peu de temps les choses s’emparent de vous !

Me voici tout triste, maintenant, à la seule