Page:Audiat - Un poète abbé, Jacques Delille, 1738-1813.djvu/10

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UN POÈTE ABBÉ

Le Ier juin 1885, le peuple de Paris faisait à Victor Hugo de grandes funérailles, un peu fastueuses peut-être. Le gouvernement s’y associa et fit en sorte que tout fût vaste et grandiose. Tout ? Non. Voulut-on, après la mort du poète, continuer l’antithèse dont il avait fait la figure dominante de ses œuvres ? De fait, il y avait un contraste presque violent entre le poète si grand et l’homme si petit. On voit encore cet immense cortège et ce modeste cercueil, cette foule prodigieuse où figuraient les grands corps de l’État, ce que la France comptait de plus illustre dans l’armée, l’institut, l’administration, le clergé excepté — il était remplacé par les Beni-Bouffe-toujours. — Et l’on croyait qu’aucune cérémonie aussi majestueuse ne s’était vue depuis la pompe funèbre de Mirabeau (4 avril 1791). Le cortège d’une lieue, qui commença à 5 heures du matin, n’arriva à Sainte-Geneviève, laïcisée ad hoc, qu’à minuit, seize soldats citoyens se relayant pour porter le cadavre, apothéose sitôt suivie des gémonies, et les restes de Mirabeau jetés à la voirie sur la proposition de Marie-Joseph Chénier, pour laisser sa place de Panthéon à Marat.

Se doute-t-on aujourd’hui qu’un autre poète, au commencement de ce siècle, balança la gloire de Victor Hugo et eut des obsèques