Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/104

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caché dans ses mains. Puis, comme si elle était vraiment à bout de forces et de courage, elle fléchit tout à coup et tomba sur les genoux.

Elle voulut se redresser, mais le poids de sa tête était trop lourd et ses mains restèrent collées au parquet. Elle eut encore un sursaut, comme les gens qui veulent échapper au sommeil ; mais dans ce mouvement, ses deux coudes se replièrent et elle s’écroula sur le côté.

Je crus qu’elle s’évanouissait, et je me levai précipitamment pour lui porter secours, mais en me penchant je vis qu’elle venait de s’endormir lourdement. Elle dormait la bouche ouverte, et son souffle était rude et régulier.

Je lui glissai un paquet de doublure sous la tête, et, dans la crainte de m’endormir comme elle, je me passai un linge mouillé sur le visage.

« Des manches qui n’aient pas l’air d’être des manches. »

Je les regardai longtemps, puis je les défis, et, après avoir plissé de la mousseline, ajusté des entre-deux, et disposé de la dentelle, je m’éloignai à mon tour du mannequin pour juger de l’effet…

Six heures sonnaient à ce moment, et le patron entrait dans l’atelier avec son teint jaune et ses cheveux ébouriffés. Il tourna autour du corsage avec des gestes d’admiration et il dit en montrant sa femme :

— Elle peut dormir maintenant, elle a fait là un beau travail.

Et il se sauva bien vite à la cuisine.