Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/124

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jamais rien n’y avait été changé. Son bois de lit démonté et cassé le jour de l’emménagement restait dans une encoignure en attendant sa réparation. Son sommier posé à même le parquet et creusé par le milieu retenait le matelas qui s’enfonçait dans le trou. Elle en riait et disait :

— Comme cela il n’y a pas de danger que je tombe du lit.

Il y avait aussi une vieille armoire à glace qui se cachait derrière la porte. Il avait fallu lui couper les pieds pour qu’elle pût entrer.

Cela lui donnait un air misérable et ridicule, et il me semblait toujours que cette armoire restait à genoux pour ne pas se cogner la tête au plafond.

Mlle Herminie habitait autant chez moi que chez elle. Si ma chambre n’était guère plus grande que la sienne, elle était beaucoup moins encombrée, et rien n’empêchait d’approcher de la fenêtre.

Le soir nous entendions les voisins descendre pour aller prendre le frais sur le boulevard.

Nous avions essayé de faire comme eux, mais la poussière que soulevaient les voitures et les piétons rendait l’air plus épais et plus désagréable qu’en haut. C’était encore chez nous que nous étions le mieux.

La porte ouverte laissait passer la lumière du gaz de l’escalier, et lorsque nos voisins remontaient, l’ombre de leur tête entrait toujours dans la chambre comme si elle venait regarder ce qui s’y passait.