Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/149

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— C’est un vieux Noël que ma mère me chantait quand j’étais petite, répondit Bergeounette.

Elle ajouta en remuant tout son corps comme d’habitude :

— C’est l’histoire de Joseph et Marie à Bethléem. Et tout de suite elle commença :

Allons, chère Marie,
    Devers cet horloger.
    C’est une hôtellerie,
    Nous y pourrons loger.

Et la voix de Bergeounette se fit soudain très douce, comme devait l’être celle de Marie, en répondant :

La maison est bien grande,
    Et semble ouverte à tous.
    Néanmoins j’appréhende
    Qu’elle ne le soit pour nous.

Gabielle s’aperçut qu’elle perdait du temps à écouter le Noël. Elle fit ronfler sa machine, et les paroles de Joseph, demandant asile pour sa femme, furent presque étouffées par le bruit. Cependant, on put entendre une voix irritée qui disait :

Les gens de votre sorte,
    Ne logent point céans.
    Frappez à l’autre porte,
    C’est pour les pauvres gens.

À travers le bruit de la machine, on suivait Joseph et Marie allant de porte en porte, et recevant sans cesse des refus et souvent des injures.