Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/189

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Félicité Damoure, qui venait d’avoir un enfant, lui donna raison contre les autres :

— Pardi ! Elle a le temps, la pôvre. Quand le moment sera venu, vous lui verrez faire une autre grimace.

Mais comme Gabielle continuait à se plier en deux, Bergeounette lui mit de force son manteau et l’obligea à quitter l’atelier.

Ce fut parmi nous comme un grand événement et la plupart des ouvrières se mirent à la fenêtre pour voir Gabielle traverser l’avenue. Mme Dalignac et le patron firent de même, et je m’approchai pour regarder comme eux.

Un lourd camion attelé de trois chevaux qui montait lentement l’avenue empêcha les deux femmes de traverser immédiatement, et Bergeounette en profita pour se retourner vers nous et nous faire des signes d’adieu. On vit bien que Gabielle voulait en faire autant, mais en se retournant ses deux pieds échappèrent à la bordure du trottoir, et elle tomba à la renverse devant l’attelage.

Il y eut des cris. Le cheval de flèche recula, se cabra et monta sur le trottoir. Puis on vit Bergeounette saisir la bride des chevaux pendant que le conducteur debout sur son siège tirait à pleines mains sur les guides.

Des gens accouraient, mais déjà Gabielle se relevait sans aide et se secouait.

Mme Dalignac n’avait pas attendu la fin pour courir en bas. Elle soutint Bergeounette autant