Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/208

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mois de juin fit rougir les premiers fruits il couvrit en même temps de coquelicots les larges talus du chemin de fer. Tout cela se brouillait au passage du train, et on ne savait plus si les fleurs étaient des cerises ou si les cerises étaient des coquelicots.

La vallée de Chevreuse avait nos préférences.

Lozère surtout ravissait Mlle Herminie. Les coteaux manquaient un peu de vignes à son gré, mais les pentes couvertes de fraisiers et de pêchers grêles lui plaisaient plus que la plaine avec ses champs d’avoine ou de blé.

Après une matinée de marche sur les routes, ou le long de sentiers perdus, nous nous arrêtions dans une petite auberge, sous une sorte de hangar ouvert à tous les vents, et construit spécialement pour les Parisiens du dimanche. Un moineau y avait fait son nid au croisement d’une poutre et d’un pilier qui soutenaient le toit. Les petits avançaient la tête sans crainte au-dessus du nid, et les parents venaient jusque sur les tables prendre les miettes de pain. Il y avait un tel silence dans la vallée que personne n’osait parler haut sous le hangar. Les plats se faisaient attendre, mais personne ne s’impatientait et chacun faisait bonne figure à la servante qui riait sans se presser. Puis nous repartions, mais que nous fussions en marche sur une route en plein soleil ou assises à l’ombre fraîche d’un bois, Mlle Herminie rappelait toujours un souvenir qui allégeait nos pas ou prolongeait notre repos. Les