Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/233

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Bergeounette. Et à l’idée de voir son mari porté en terre elle chantait gaiement :

On sonnera les cloches
    Avec des pots cassés.

Roberte qui ne perdait pas l’habitude des mots de travers disait de Bergeounette :

— Elle est gaie comme un pinson dans l’eau.

Les mots stupides de Roberte faisaient toujours rire les autres à ses dépens, mais elle ne s’en fâchait pas. Elle prenait une pose prétentieuse pour placer une nouvelle phrase saugrenue, et tout était dit.

Par contre Félicité Damoure supportait mal l’imitation de son accent, et ses remarques désagréables entretenaient la chicane dans son entourage. Elle ne supportait pas mieux l’idée d’un atelier où personne ne gouvernait et où chaque ouvrière avait une façon différente de mener à bien son travail. Dans la bousculade des moments de livraison, elle restait comme ahurie, et c’était toujours dans le calme revenu qu’elle lançait d’une voix rageuse :

— Là où il n’y a pas de commendemengue, il n’y a que du désordre.

Elle regrettait le patron qui savait commander et mettre chacun à sa place et il lui arrivait de vouloir l’imiter ; mais les répliques ne se faisaient pas attendre. Bergeounette ne lui épargnait pas les railleries :