Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/28

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mettais à courir après, et les Oies en profitaient pour s’envoler ; mais si je n’en ai guère tué moi-même, en revanche j’en ai vu tuer beaucoup et de la plus belle espèce. Je vous demanderai la permission de vous raconter une ou deux anecdotes qui ont trait à ce genre d’exercice.

Je connais intimement l’un des meilleurs chasseurs qui soient, de nos jours, dans tous les pays de l’ouest. Force, adresse, patience et courage, il possède toutes ces qualités de premier ordre pour un pareil métier. Souvent, à minuit, je l’ai vu monter un cheval vigoureux et rapide, alors que le thermomètre marquait zéro, que la terre était couverte de neige et de glace, et que le verglas enveloppait si complétement les arbres, que vous les eussiez crus de verre. Mais que lui importe ? Il part au petit galop, son cheval est ferré à neuf, et personne ne sait où il va, personne, excepté moi, qui suis toujours à ses côtés. Sa valise contient notre déjeuner, force munitions et autres provisions nécessaires. La nuit est noire comme la cheminée et passablement rude ; mais il connaît les bois comme pas un chasseur du Kentucky, et moi, sous ce rapport, je ne lui en céderais guère. Nous marchons depuis longtemps, et les premiers rayons du jour commencent à poindre vers l’orient ; nous savons parfaitement où nous sommes : nous avons fait juste vingt milles. Les cris de la chouette nébuleuse[1] interrompent seuls le silence mélancolique de l’heure matinale. Nous attachons nos chevaux

  1. The barred Owl.