Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/315

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nirs non moins agréables. Me reposant un jour, sous la fraîche véranda du major Glassel, à la Clef de l’Ouest, j’observais une de ces Frégates qui venait de forcer un sterne de Cayenne, encore en vue, à lâcher un poisson que le ravisseur aux puissantes ailes avait sans peine arrêté dans sa chute. Ce poisson, long d’environ huit pouces, était un peu fort pour le sterne. La Frégate s’enleva, l’emportant en travers dans son bec ; puis elle le jeta en l’air et le reprit comme il tombait, mais par la queue. Une seconde fois elle le lâcha pour le rattraper, lorsqu’il n’était descendu que de quelques mètres, mais encore par la queue ; le poids de la tête, je m’imagine, l’avait empêchée de le saisir autrement ; pour la troisième fois lancé en l’air, il fut enfin reçu comme il fallait, la tête en bas, et avalé sur le coup.

À l’heure où la lumière du matin commence à réjouir la nature, où les chantres des airs attendent, silencieux encore, les premiers rayons du soleil et se disposent à saluer son retour de leurs plus brillants concerts, la Frégate ouvre ses ailes et quitte la retraite où elle a passé la nuit. Doucement et sans effort, le cou ramené en arrière, elle glisse et semble vouloir essayer la vigueur renouvelée de son vol. Elle s’avance vers l’abîme, monte, monte encore, et, longtemps avant tout autre oiseau, peut voir l’astre étincelant sortir des flots. Quelle limpidité dans l’azur des cieux ; quelle riche couleur d’un vert foncé sur la mer qu’aucun souffle n’agite ! tout annonce une magnifique journée ; et maintenant l’oiseau secoue ses ailes avec transport, et bien loin, au sein des airs, son essor l’emporte là où ne peut