Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/314

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vont retomber dans l’eau. La Frégate l’a remarqué ; elle ferme les ailes, plonge vers lui, et remonte bientôt avec l’un des pauvres fuyards, chétive proie qu’elle tient en travers dans son bec. D’autres fois, planant à plus de cinquante verges au-dessus de la mer, elle aperçoit un marsouin en pleine chasse, s’élance encore, et en passant enlève le mulet qui déjà se réjouissait d’avoir échappé à son redoutable ennemi. Mais ce poisson est trop gros pour son gosier ; alors elle monte en le mâchonnant, et semble vouloir se perdre dans les nuages. Cependant trois ou quatre autres maraudeurs de son espèce la guettaient et viennent d’être témoins de sa bonne fortune ; les ailes toutes grandes ouvertes, ils se précipitent après elle, s’élèvent en décrivant de larges cercles, tranquillement et comme certains de bientôt la rejoindre. Parvenus tous à la même hauteur, ils s’en approchent, la harcèlent à coups d’ailes, et c’est à qui lui ravira sa proie. Ah ! l’un d’eux s’en est emparé !… Mais non : à son tour, le poisson contesté lui échappe et roule dans l’air ; un autre, qui l’a déjà repris, voit bientôt la bande entière à ses trousses ; et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’enfin, ballotté de bec en bec et tout à fait mort, l’infortuné poisson tombe rapidement et disparaisse cette fois sous les flots. Cruel désappointement pour tous ces ventres affamés ; mais ils l’ont bien mérité !

Des scènes comme celles-ci, vous pouvez en voir chaque jour, pour peu que vous vous donniez la peine de visiter les Clefs de la Floride ; mais il m’en reste d’autres à vous décrire et qui me rappellent des souve-