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LES CHERCHEURS D’ŒUFS DU LABRADOR.


On donne ce nom à certains individus, dont l’occupation principale, sinon exclusive, est de se procurer des œufs d’oiseaux, pour aller ensuite les vendre à quelque port éloigné. Leur grand objet est de piller tout nid qu’ils trouvent, n’importe en quel lieu et à quels risques. C’est le fléau des malheureux oiseaux ; et leur brutal penchant à détruire ces innocentes créatures, après les avoir volées, se satisfait sans miséricorde, chaque fois qu’une occasion s’en présente.

On m’en avait dit beaucoup sur le compte de ces affreux pirates, avant que j’eusse visité les côtes du Labrador ; mais, en vérité, je n’aurais pu croire à tant de cruauté, si je n’en avais été témoin moi-même ; c’est à faire horreur ! Jugez plutôt :

Voyez-vous se traîner, là-bas, cette honteuse chaloupe ? Elle rampe comme un voleur ; on dirait qu’elle redoute la clarté des cieux. À l’ombre, derrière chaque île rocailleuse, un individu qui tient le gouvernail lui fait faire halte. Si son métier était honnête, elle ne chercherait pas à se cacher ainsi ; elle ne se déroberait pas au milieu de ces épouvantables rochers, sombre retraite des myriades d’oiseaux qui, tous les ans, dans cette région désolée de la terre, viennent pour élever leur jeune famille loin des embûches qui les menacent