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Cette épaisseur, qui est la beauté morale de l’architecture, s’offre ici dans toute sa richesse.

Les rayons de clarté, qui traversent l’intérieur de l’édifice, animent sa solitude.


Quelle erreur de croire que le style gothique est constitué par l’ogive ! L’église de Saint-Étienne de Nevers est absolument plein cintre : romane, donc ? Mais non ! Tous les caractères essentiels du Gothique sont là et il ne suffit pas d’un détail pour caractériser un ensemble.


Cette décoration romane composée de grandes niches profondes, superposées, c’est un souvenir du columbarium.


Un pont à arcatures, contrefort extérieur, vient consolider les murs. Au-dessus, ces colonnettes courtes, fortes, épaisses, à grosses têtes ; leurs arcatures, animées de volonté, semblent des cariatides.


Cette nef est inondée de lumière dégradée, cette lumière qu’aimait Raphaël. Et il y a aussi des clartés à la Clouet.

Les Grecs ont compris avant tout et avant nous cette magie de la lumière. Les Gothiques l’ont reprise d’eux-mêmes, parce qu’il est dans la nature de l’homme d’adorer les effets du soleil, de les exprimer en les conduisant selon leur sens naturel. — Ici, l’effet est donné par les fermetés que les colonnettes accentuent.


L’esprit qui créa le Parthénon est le même esprit qui créa la Cathédrale. Divine beauté ! Il y a seulement, ici, plus de finesse : il y a, si j’ose dire, un brouillard lumineux, où la lumière non striée dort, comme dans les vallons. Ceux qui ont visité ces nefs aux heures du matin me comprennent.


Ces trois niches, triple conseil d’enthousiasme !

Partout, cependant, je respire cette atmosphère d’humidité, d’humilité, qui sent la prison. Elle ramène mon esprit à cette pensée initiale — douleur, sacrifice, amour — qui produisit la Cathédrale.