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LE PRINCE

des écureuils ; ils sont fort laids, mais leur adresse est sans pareille. — Ah ! que j’en voudrais avoir, dit la princesse : s’ils étaient moins légers, on en pourrait attraper. »

Lutin, qui avait passé par cette forêt, se douta bien que c’étaient des singes. Aussitôt il s’y souhaita ; il en prit une douzaine de gros, de petits, et de plusieurs couleurs différentes ; il les mit avec bien de la peine dans un grand sac ; puis il se souhaita à Paris, où il avait entendu dire que l’on trouvait tout ce qu’on voulait pour de l’argent. Il fut acheter chez Dautel, qui est un curieux, un petit carrosse tout d’or, où il fit atteler six singes verts, avec de petits harnais de maroquin couleur de feu, garnis d’or. Il alla ensuite chez Brioché, fameux joueur de marionnettes ; il y trouva deux singes de mérite : le plus spirituel s’appelait Briscambille, et l’autre Perceforêt ; ils étaient très-galans et bien élevés. Il habilla Briscambille en roi, et le mit dans le carrosse : Perceforêt servait de cocher, les autres singes étaient vêtus en pages ; jamais rien n’a été plus gracieux. Il mit le carrosse et les singes bottés dans le même sac ; et comme la princesse n’était pas encore couchée, elle entendit dans sa galerie le bruit du petit carrosse, et ses nymphes vinrent lui conter l’arrivée du roi des nains. En même temps le carrosse entra dans sa chambre avec le cortége singenois, et les singes de campagne ne laissaient pas de faire des tours de passe-passe qui valaient bien ceux de Briscambille et de Percefo-