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LUTIN

rêt : pour dire la vérité, Lutin conduisait toute la machine. Il tira le magot du petit carrosse d’or, lequel tenait une boite couverte de diamans, qu’il présenta de fort bonne grâce à la princesse. Elle l’ouvrit promptement, et trouva dedans un billet où elle lut ces vers :

Que de beautés ! que d’agrémens !
Palais délicieux que vous êtes charmant !
Mais vous ne l’êtes pas encore
Autant que celle que j’adore.
Bienheureuse tranquillité
Qui régnez dans ce lieu champêtre ;
Je perds chez vous ma liberté,
Sans oser en parler ni me faire connaitre !

Il est aisé de juger de sa surprise ; Briscambille fit signe à Perceforêt de venir danser avec lui ; tous les fagotins si renommés n’approchent en rien de l’habileté de ceux-ci. Mais la princesse, inquiète de ne pouvoir deviner d’où venaient ces vers, congédia les baladins plus tôt qu’elle n’aurait fait, quoiqu’ils la divertissaient infiniment, et qu’elle eût fait d’abord des éclats de rire à s’en trouver mal. Enfin elle s’abandonna toute entière à ses réflexions, sans qu’elle pût démêler un mystère si caché.

Léandre, content de l’attention avec laquelle ces vers avaient été lus, et du plaisir que la princesse avait pris à voir les singes, ne songea qu’à prendre un peu de repos, car il en avait un grand besoin ; mais il craignait de choisir un appartement occupé par quelqu’une des nymphes de la princesse. Il demeura quelque temps dans la grande galerie du palais, ensuite il des-