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LA PRINCESSE

mènera dans le plus beau royaume du monde ? — Oui-dà, mon père ; dit-elle en faisant une profonde révérence, je veux tout ce qui vous plaira, pourvu que ma bonne maman y consente. — J’y consens, ma mignonne, dit la reine en l’embrassant. Allons, que l’on couvre les tables. » Ce qu’on fit en diligence. Il y en avait cent dans une grande galerie, et, de mémoire d’homme, l’on n’a tant mangé, excepté Printanière et Fanfarinet, qui ne songeaient qu’à se regarder, et qui rêvaient si fort, qu’ils en oubliaient tout.

Après le repas, il y eut bal, ballet et comédie ; mais il était déjà si tard, et l’on avait tant mangé, que, malgré qu’on en eût, on dormait tout debout. Le roi et la reine, saisis de sommeil, se jetèrent sur un canapé ; la plupart des dames et des cavaliers ronflaient, les musiciens détonnaient, et les comédiens ne savaient ce qu’ils disaient ; nos amans seuls étaient éveillés comme des souris, et se faisaient cent petites mines. La princesse voyant qu’il n’y avait rien à craindre, et que les gardes, couchés sur leurs paillasses, dormaient à leur tour, elle dit à Fanfarinet : « Croyez-moi, profitons d’une occasion si favorable ; car si j’attends la cérémonie des épousailles, le roi me donnera des dames pour me servir, et un prince pour m’accompagner chez votre roi Merlin ; il vaut donc mieux nous en aller à présent, le plus vite que nous pourrons. »

Elle se leva et prit le poignard du roi, qui était tout garni de diamans, et le diadème de