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LA BONNE

Joliette en faisant la révérence ; j’en serais fort aise. — Hé bien, dit la fée, soyez donc contente, je vous en dirai davantage demain. »

Elle se rendit en diligence à son beau château, où la reine était occupée à filer de la soie. La petite souris lui cria : « Voulez-vous gager, madame la reine, votre quenouille et votre fuseau, que je vous apporte les meilleures nouvelles que vous puissiez jamais entendre ? Hélas ! répliqua la reine, depuis la mort du roi Joyeux et la perte de ma Joliette, je donnerais bien toutes les nouvelles de ce monde pour une épingle. — Là, là, ne vous chagrinez point, dit la fée, la princesse se porte à merveille, je viens de la voir, elle est si belle, si belle, qu’il ne tient qu’à elle d’être reine. » Elle lui conta tout d’un bout à l’autre ; et la reine pleurait de joie de savoir sa fille si belle, et de tristesse qu’elle fut dindonnière. « Quand nous étions de grands rois dans notre royaume, disait-elle, et que nous faisions tant de bombance, le pauvre défunt et moi nous n’aurions pas cru voir notre enfant dindonnière ! — C’est la cruelle Cancaline, ajouta la fée, qui sachant comme je vous aime, pour me faire dépit, l’a mise en cet état ; mais elle en sortira, ou j’y brûlerai mes livres. — Je ne veux pas dit la reine, qu’elle épouse le fils du méchant roi ; allons dès demain la querir, et l’amenons ici. »

Or, il arriva que le fils du méchant roi étant tout-à-fait fâché contre Joliette, fut s’asseoir sous un arbre, où il pleurait si fort ; si fort qu’il hur-