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LE NAIN

de trop bonne foi pour vouloir servir vos ennemis : le procédé de la fée du Désert et celui du Nain Jaune m’ont aigrie contr’eux, je vois tous les jours votre infortunée princesse ; sa beauté et son mérite me font une égale pitié, et, je le répète encore, si vous avez de la confiance en moi, je vous sauverai. — J’en ai une si parfaite, s’écria le roi, que je ferai tout ce que vous m’ordonnerez ; mais puisque vous avez vu ma princesse, apprenez-moi de ses nouvelles. — Nous perdrions trop de temps à nous entretenir, lui dit-elle ; venez avec moi, je vais vous porter au château d’acier, et laisser sur ce rivage une figure qui vous ressemblera si fort, que la fée en sera la dupe. »

Elle coupa aussitôt des joncs marins, elle en fit un gros paquet, et soufflant trois fois dessus, elle leur dit : « Joncs marins, mes amis, je vous ordonne de rester étendus sur le sable, sans en partir, jusqu’à ce que la fée du Désert vous vienne, enlever. » Les joncs parurent couverts de peau, et si semblables au roi des mines d’or, qu’il n’avait jamais vu une chose si surprenante ; ils étaient vêtus d’un habit comme le sien, ils étaient pâles et défaits, comme s’il se fût noyé ; en même temps la bonne sirène fit asseoir le roi sur sa grande queue de poisson, et tous les deux voguèrent en pleine mer, avec une égale satisfaction.

« Je veux bien à présent, lui dit-elle, vous apprendre que lorsque le méchant Nain Jaune eut enlevé Toute-Belle, il la mit malgré la