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JAUNE.

interdit et en suspens ; il ne savait à quoi se résoudre : lui qui faisait profession de respecter le beau sexe, et d’en être le chevalier à toute outrance, il fallait que dans cette occasion il se portât à le détruire ; mais une voix qu’il entendit le fortifia tout d’un coup. « Frappe, frappe : n’épargne rien, lui dit cette voix, ou tu perds ta princesse pour jamais. »

En même temps sans rien répondre à ces nymphes, il se jette au milieu d’elles, rompt leurs guirlandes, les attaque sans nul quartier, et les dissipe en un moment : c’était un des derniers obstacles qu’il devait trouver ; il entra dans le petit bois où il avait vu Toute-Belle : elle y était au bord de la fontaine, pâle et languissante. Il l’aborde en tremblant ; il veut se jeter à ses pieds ; mais elle s’éloigne de lui avec autant de vitesse et d’indignation que s’il avait été le Nain Jaune. « Ne me condamnez pas sans m’entendre, madame, lui dit-il ; je ne suis ni infidèle, ni coupable ; je suis un malheureux qui vous ai déjà déplu sans le vouloir. — Ah ! barbare, s’écria-t-elle, je vous ai vu traverser les airs avec une personne d’une beauté extraordinaire ; est-ce malgré vous que vous faisiez ce voyage ? — Oui, princesse, lui dit-il, c’était malgré moi ; la méchante fée du Désert ne s’est pas contentée de m’enchaîner à un rocher, elle m’a enlevé dans son char jusqu’à un des bouts de la terre, où je serais encore à languir sans le secours inespéré d’une sirène bienfaisante, qui m’a conduit jusqu’ici. Je viens, ma princesse