Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/326

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
314
SERPENTIN

suadée qu’elle rêvait : mais au bout d’un moment elle entendit chanter ces vers, qui semblaient faits pour elle.

Souffrez qu’ici l’amour vous blesse,
L’on y ressent ses tendres feux.
Ce dieu bannit notre tristesse :
Nous nous plaisons dans ce séjour heureux.
Souffrez qu’ici l’amour vous blesse,
L’on y ressent ses tendres feux.

L’attention qu’elle fit à ces paroles, la réveilla tout-à-fait. « De quel bonheur et de quelle infortune suis-je menacée ? dit-elle ; en l’état où je suis, reste-t-il encore de beaux jours ? » Elle ouvrit les yeux avec quelque sorte de crainte, appréhendant de se trouver environnée de monstres, mais quelle fut sa surprise, lorsqu’au lieu de ce rocher affreux et sauvage, elle se trouva dans une chambre toute lambrissée d’or ? Le lit où elle était couchée, répondait parfaitement à la magnificence du plus beau palais de l’univers. Elle se faisait là-dessus cent questions, ne pouvant croire qu’elle fût bien éveillée. Enfin elle se leva, et courut ouvrir une porte vitrée qui donnait sur un spacieux balcon, d’où elle découvrit toutes les beautés que la nature, secondée de l’art, peuvent ménager sur la terre ; des jardins remplis def leurs, de fontaines, de statues, et d’arbres rares ; des forêts en éloignement ; des palais dont les murs étaient ornés de pierreries, les toits de perles, si merveilleusement faits, que c’étaient autant de chefs-d’œuvre ; une mer douce et paisible, couverte de mille