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SERPENTIN

der aux pagodes si leur roi était de retour. Ils lui dirent que non. Cette réponse qui s’accordait mal avec ce qu’elle avait entendu, l’inquiéta ; elle ne laissa pas de demander encore si leur roi était jeune et bien fait : on lui dit qu’il était jeune, qu’il était bien fait et fort aimable. Elle demanda si l’on avait souvent de ses nouvelles. On lui dit qu’on en avait tous les jours. « Mais sait-il, ajouta-t-elle, que je suis dans son palais ? — Oui, madame, répliqua-t-on, il sait tout ce qui se passe à votre égard, il s’y intéresse, et l’on fait partir d’heure en heure des courriers qui vont lui apprendre de vos nouvelles. » Elle se tut et commença à rêver beaucoup plus souvent qu’elle n’avait accoutumé de le faire.

Quand elle était seule, la voix lui parlait : elle en avait quelquefois peur ; mais elle lui faisait quelquefois plaisir ; car il n’y avait rien de si galant que tout ce qu’elle lui disait. « Quelque résolution que j’aie faite de ne jamais aimer, répondait la princesse, et quelque raison que j’aie de défendre mon cœur d’un engagement qui ne lui pourrait être que fatal, je vous avoue cependant que je serais bien aise de connaître un roi dont le goût est aussi bizarre que le vôtre ; car, s’il est vrai que vous m’aimiez, vous êtes peut-être le seul dans le monde qui puissiez avoir une semblable faiblesse pour une personne aussi laide que moi… Pensez tout ce qui vous plaira de mon caractère, mon adorable princesse, lui répondait la voix, je trouve assez de quoi le justifier