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LA BICHE

raconta la supercherie que Longue-Epine et sa mère avaient faite, ajoutant qu’il fallait se hâter d’envoyer dire au roi son père, le bonheur qu’il avait eu de la trouver ; parce qu’il allait faire une terrible guerre, pour tirer raison de l’affront qu’il croyait avoir reçu. Désirée le pria d’écrire par Becafigue. Il voulait lui obéir lorsqu’un bruit perçant de trompettes, clairons, timbales et tambours se répandit dans la forêt ; il leur sembla même qu’ils entendaient passer beaucoup de monde proche de la petite maison. Le prince regarda par la fenêtre, il reconnut plusieurs officiers, ses drapeaux et ses guidons : il leur commanda de s’arrêter et de l’attendre.

Jamais surprise n’a été plus agréable que celle de cette armée : chacun était persuadé que leur prince allait la conduire, et tirer vengeance du père de Désirée. Le père du prince les menait lui-même malgré son grand âge. Il venait dans une litière de velours en broderie d’or, elle était suivie d’un chariot découvert ; Longue-Epine y était avec sa mère. Le prince Guerrier ayant vu la litière, y courut, et le roi lui tendant les bras, l’embrassa avec mille témoignages d’un amour paternel : « Et d’où venez-vous, mon cher fils ? s’écria-t-il ; est-il possible que vous m’ayez livré à la douleur que votre absence me cause. — Seigneur, dit le prince, daignez m’écouter. » Le roi aussitôt descendit de sa litière, et se retirant dans un lieu écarté, son fils lui apprit l’heureuse rencontre qu’il avait faite, et la fourberie de Longue-Epine.