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BLANCHE.

pour écouter notre conversation ; je n’en avais jamais vu qu’en peinture. Je ne fus pas fâchée qu’une rencontre inespérée me fournit cette occasion ; de sorte que ne me défiant point du danger qui est attaché à la satisfaction de voir un objet aimable, je m’avançai pour le regarder, et plus je le regardais, plus j’y prenais de plaisir. Il me fit une profonde révérence, il attacha ses yeux sur moi et me parut très en peine de quelle manière il pourrait m’entretenir ; car ma fenêtre était fort haute ; il craignait d’être entendu, et il savait bien que j’étais dans le château des fées.

» La nuit vint presque tout d’un coup, ou, pour parler plus juste, elle vint sans que nous nous en aperçussions ; il sonna deux ou trois fois du cor, et me réjouit de quelques fanfares, puis il partit sans que je pusse même distinguer de quel côté il allait, tant l’obscurité était grande. Je restai très-rêveuse ; je ne sentis plus le même plaisir que j’avais toujours pris à causer avec mon perroquet et mon chien. Ils me disaient les plus jolies choses du monde, car des bêtes fées deviennent spirituelles ; mais j’étais occupée, et je ne savais point l’art de me contraindre. Perroquet le remarqua ; il était fin, il ne témoigna rien de ce qui lui roulait dans la tête.

» Je ne manquai pas de me lever avec le jour. Je courus à ma fenêtre ; je demeurai agréablement surprise d’apercevoir au pied de la tour le jeune chevalier. Il avait des habits magni-