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BLEU.

landes de fleurs, qui faisaient un effet admirable quand elles étaient placées dans ses beaux cheveux. Elle n’avait que quinze ans lorsque le roi se remaria.

La nouvelle reine envoya querir sa fille qui avait été nourrie chez sa marraine la fée Soussio ; mais elle n’en était ni plus gracieuse, ni plus belle. Soussio y avait voulu travailler et n’avait rien gagné ; elle ne laissait pas de l’aimer chèrement : on l’appelait Truitonne, car son visage avait autant de taches de rousseurs qu’une truite ; ses cheveux noirs étaient si gras et si crasseux que l’on n’y pouvait toucher et sa peau jaune distillait de l’huile. La reine ne laissait pas de l’aimer à la folie, elle ne parlait que de la charmante Truitonne ; et comme Florine avait toutes sortes d’avantages au-dessus d’elle, la reine s’en désespérait ; elle cherchait tous les moyens possibles de la mettre mal auprès du roi : il n’y avait point de jours que la reine et Truitonne ne fissent quelque pièce à Florine. La princesse qui était douce et spirituelle, tâchait de se mettre au-dessus de ce mauvais procédé.

Le roi dit un jour à la reine, que Florine et Truitonne étaient assez grandes pour être mariées, et que le premier prince qui viendrait à la cour, il fallait faire en sorte de lui en donner une des deux. « Je prétends, répliqua la reine, que ma fille soit la première établie ; elle est plus âgée que la vôtre ; et comme elle est mille fois plus aimable, il n’y a pas à balancer