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L’OISEAU BLEU.

ayant entendu quelque bruit, elle écouta sans faire semblant de rien ; puis elle règarda, et vit au clair de la lune le plus bel Oiseau de l’univers qui parlait à la princesse, qui la caressait avec sa patte, qui la becquetait doucement ; enfin elle entendit plusieurs choses de leur conversation, et demeura très étonnée, car l’Oiseau parlait comme un homme, et la belle Florine lui répondait avec tendresse.

Le jour parut, ils se dirent adieu ; et comme s’ils eussent eu un pressentiment de leur prochaine disgrâce, ils se quittèrent avec une peine extrême : la princesse se jeta sur son lit toute baignée de ses larmes, et le roi retourna dans le creux de son arbre. Sa geôlière courut chez la reine ; elle lui apprit tout ce qu’elle avait vu et entendu. La reine envoya querir Truitonne et ses confidentes ; elles raisonnèrent longtemps ensemble, et conclurent que l’Oiseau Bleu était le roi Charmant ! Quel affront ! s’écria la reine. Quel affront, ma Truitonne ! Cette insolente princesse, que je croyais si affligée, jouissait en repos des agréables conversations de notre ingrat ! Ah ! je me vengerai d’une manière si sanglante, qu’il en sera parlé. Truitonne la pria de n’y perdre pas un moment.

La reine renvoya l’espionne dans la tour ; elle lui ordonna de ne témoigner ni soupçon ni curiosité, et de paraître plus endormie qu’à l’ordinaire. Elle se coucha de bonne heure, elle ronfla de son mieux ; et la pauvre princesse déçue ouvrant la fenêtre, s’écria :


Oiseau Bleu, couleur du temps,
Vole à moi promptement.