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LA BELLE AUX CHEVEUX D’OR.

bien aise de vous favoriser plus qu’un autre ; mais il faut que vous sachiez qu’il y a un mois je fus me promener sur la rivière avec toutes mes dames, et comme l’on me servit la collation, en ôtant mon gant je tirai de mon doigt une bague qui tomba par malheur dans la rivière : je la chérissais plus que mon royaume ; je vous laisse juger de quelle affliction cette perte fut suivie ; j’ai fait serment de n’écouter jamais aucune proposition de mariage, que l’ambassadeur qui me proposera un époux ne me rapporte ma bague. Voyez à présent ce que vous avez à faire là-dessus ; car quand vous me parleriez quinze jours et quinze nuits, vous ne me persuaderiez pas de changer de sentiment.

Avenant demeura bien étonné de cette réponse ; il lui fit une profonde révérence, et la pria de recevoir le petit chien, le panier et l’écharpe ; mais elle lui répliqua qu’elle ne voulait point de présents, et qu’il songeât à ce qu’elle venait de lui dire.

Quand il fut retourné chez lui, il se coucha sans souper ; et son petit chien, qui s’appelait Cabriolle, ne voulut pas souper non plus : il vint se mettre auprès de lui. Tant que la nuit fut longue, Avenant ne cessa point de soupirer. Où puis-je prendre une bague tombée depuis un mois dans une grande rivière, disait-il ? c’est toute folie de l’entreprendre. La princesse ne m’a dit cela que pour me mettre dans l’impossibilité de lui obéir : il soupirait et s’affligeait très fort. Cabriolle qui l’écoutait, lui dit : Mon cher maître, je vous prie, ne désespérez point de votre bonne fortune ; vous êtes trop aimable pour n’être pas heureux : allons dès qu’il sera jour au bord de la rivière. Avenant